• Beaux Arts

    Mon ancienne prof d'arts plastiques m'ayant gracieusement proposé de l'accompagner, elle et son groupe, aux Beaux-Arts de Rennes, j'ai immédiatement accepté. Voici donc ma réaction vis-à-vis cette antre un peu folle, avec ses étudiants hippies et ses sculptures contemporaines incompréhensibles MAIS artistiques.

    Tout d'abord, j'ai été littéralement bluffée par la géographie des lieux: situés en plein millieu de la vieille ville de Rennes, cotoyant les manoirs, le Parlement de Bretagne, les places grandioses, les maisons à colombage, les Beaux-Arts représentent vraiment un cadre sympathique. Eux-même ressemblent en tout point (à peu de choses près) à ce que je m'étais imaginée: de longs couloirs blancs, un cloâtre, de la pierre blanche, deux étages, un sous-sol, un jardin, des statues d'hommes nus dans les couloirs. Evidemment, c'est un véritable labyrinthe là-dedans, essayez de vous diriger... regardez le plan du bâtiment par vous même:

    Beaux Arts

    (cliquez pour aggrandir)

    Ca ne ressemble pas du tout à une école. Ici, pas de classes, pas de chaises, même, sauf dans les salles de conférences: nous n'avons vu que des ateliers. Et pour cause! Ce ne sont pas les ateliers qui manquent! Atelier céramique, atelier musique, atelier sculpture, atelier dessin, atelier design (probablement le plus fourni de tous ceux que j'ai pu voir), atelier communication, atelier imprimerie (je vous parlerai un peu plus loin de ce truc génial), sans oublier bien sûr les ateliers des étudiants. Un étage entier leur est réservé. Ce sont en vérité des boxes, séparés par des murs de plâtre fin, avec des tables à trétaux croûlant sous les traveaux artistiques: dessin, argile, peinture... nous avons pu admirer une langue de boeuf en plâtre criante de vérité, ainsi qu'un poulet (un poulet à manger, plumé, sans tête, celui qu'on met dans le four) en peinture. C'est vraiment déjanté, comme endroit, on y trouve de tout! Il y avait même des empruntes de pieds au plafond. A trois mètres de haut, facilement. 

    Et comme ces pieds-là m'ont intriguée, j'ai regardé ce qu'il y avait sur les murs (outre les tableaux). Eh bien croyez-le ou non, les étudiants dessinent et écrivent sur les murs. Mieux: ils dialoguent. Voici quelques échantillons de ce que j'ai pu lire: 

    "Jeune cadre dynamique, ou jeune cadre à dynamiter ?..."

    "La perfection m'ennuie, elle confond l'Art et l'excellence." (ma préférée, je pense)

    Il y en avait d'autres, mais je les ai oubliées...

     

    Ils dessinent sur les murs, oui, mais aussi par terre. Ainsi, un jeune homme (je suis littéralement tombée amoureuse de ses cheveux) reproduisait un genre de gribouillis inextricable (il avait un modèle à carreaux à côté de lui, mais c'était pas beaucoup plus clair), et quand il a vu que je l'observais il a dit du du ton le plus sérieux du monde:

    "Vous pouvez poser des questions... sur mon travail..."

    J'ai bien aimé sa nonchalence...  J'aurais bien voulu lui répondre: "D'accord. C'est quoi, au juste ?" mais les autres s'étaient éloignés et m'attendaient pour continuer à avancer, et j'ai du les rejoindre. Un peu plus loin, il y avait une copie d'un temple maya ou aztèque réalisé en... blocs de sucre. Vous savez, ceux qu'on met dans les cafés ? Bref, tout est normal, je ne vois pas ce qu'il y a de bizarre. 

    Ce qu'il y a de bien là-bas aussi, c'est que les gens sont beaux. Mais tous: les jeunes filles, les jeunes hommes, les femmes, les hommes. Et ils ont tous les cheveux bouclés. C'est à se demander s'ils n'acceptent au sein de l'école que les manequins s'étant fait faire une permanente. C'est agréable à regarder, certes, mais ça déroute un peu. Je m'étais imaginé une école d'arts, moi, pas une école de mode... ah oui! Ils portent tous des tenues démentes. J'ai moi-même eu ma période jupe/collants rayés multicolores/bottines/jean déchiré (on a tous eu une période comme ça...) mais là ça dépassait l'entendement. Et il y avait pleins de filles rousses, j'étais dégoûtée, j'avais envie de leur sauter dessus: "S'cusez-moi, s'cusez! Z'êtes une vraie rousse ? Z'utilisez quelle marque de coloration, sinon ?" 

    Et puis, ils font des expériences bizarres, aux Beaux-Arts. J'ai vu deux filles qui, l'air très sérieux, empilaient des assiettes, des verres et des bols en céramique de sorte à bâtir une tour, puis étudiaient à quel moment celle-ci tomberait. J'ai vu aussi une bande d'élèves qui jouaient à "1, 2, 3 soleil!" avec des assiettes en équilibre sur la tête. (On nous a dit que l'école récupérait les matériaux invendus auprès de grossistes, à mon avis ils ont reçu un gros stock de services de table...) Plus intéressant (mais tout aussi inutile), j'ai vu tout un groupe d'étudiants qui avaient posé une pile de cailloux sur un ampli, et ils s'amusaient à monter le volume petit à petit, de sorte que le tas de pierres bougeait à cause de la force du son. C'était bien, ça, j'ai bien aimé. 

    Ce qui est cool aux Beaux-Arts, c'est que y a de l'art. Partout. Même si tu ne sais pas vraiment ce que c'est, c'est de l'Art. Tu peux créer n'importe quoi, hop! c'est de l'Art. Tiens, je vais fabriquer un pannier design en papier-mâché, et puis j'incorporerai des miettes d'aluminium, et ça va se vendre hyper cher. Oui bon, j'avoue, l'art contemporain, ce n'est pas tellement ma tasse de thé, je suis assez classique, finalement. Snif! (D'un côté... un point noir sur un tableau blanc... oui bon, j'me tais, j'me tais). Et les oeuvres portent des noms rigolos. Comme cet excellent pressoir à dentifrice, que nous avons pu observer dans une sale d'oeuvres contemporaines (allez hop, je vous scanne la feuille d'explication qui allait avec! Vous allez rire:

    Beaux Arts


      Dans cette même salle, il y avait un petit Carnac (vous savez, le plus important site mégalithique!), avec des petits cailloux alignés soigneusement par terre, et peints de couleurs fluos.

    Et puis on est descendus au sous-sol, où trône la menuiserie. Là, nous avons fait la connaissance de Tom le Menuisier (je ne sais pas vraiment s'il s'appelle Tom, mais il avait une tête à s'appeller Tom, alors voilà, moi je l'appelle Tom) nous a expliqué le fonctionnement de l'école. Apparemment, ils préfèrent que les élèves de première année (ça me fait penser à Harry Potter ça, pour un peu j'ajouterai que les nouveaux venus doivent poser un chapeau sur leur tête qui choisit dans quelle maison ils vont aller: Toi, tu vas en Musique, toi, tu vas en Peinture, toi, tu vas en Communication...) touchent un peu à toutes les options proposées (y en a onze en tout si j'ai bien compris). Tom le (charmant) Menuisier nous a aussi dit qu'on devait présenter notre "book" (les douze travaux qu'on a accompli avec Hercule nous-même), et nos projets futurs. Apparemment, il faut éviter d'alambiquer nos explications en disant, par exemple "Alors voilà, j'ai mis du rouge pour représenter du sang, la souffrance, parce-que vous savez un grain de maïs peut souffri, il y a des insectes nuisibles qui le rongent, et puis j'ai mis du jaune, pour symboliser la jalousie par rapport au grain voisin, qui bénéficie plus de soleil, et puis j'ai tracé de grands traits vifs pour signifier la haine, par rapport au pied de salade qui pousse mieux...", non, ça, ça plaît pas aux profs. On doit juste dire pourquoi on a eu envie de créer ça. Avouez que c'est bien plus cool!

    Malheureusement, pressés par le temps, nous n'avons pas pu visiter le dernier étage, et je pense que c'était là-haut qu'il y avait tous les ateliers de dessin  Je suis triiiiiste!

     

    Par contre nous avons eu droit à un défilé (quand je vous disait que c'était une école de mode...). Les élèves, ayant fabriqué chacun un costume en rapport avec leur branche de prédilection, l'ont porté en déflant sur de la musique de malade dans le cloître. Ca avait l'air bien nul, au départ, et puis quand j'ai vu THE costume, j'ai aussitôt changé d'avis. Du coup, je vous ai dessiné la bête, pour que vous voyiez un peu ce que je veux dire. La voilà: 

    Beaux Arts

    Imaginez un instant un mec comme ça se dandinant comme Gollum, fixant tout le monde avec méfiance, avec ses deux yeux ronds et noirs... difficile de ne pas rire (même si c'était carrément flippant au début, surtout quand j'ai compris que ce n'était pas une statue et que j'ai sursauté. Hum.) Il avait donc une nappe en velours noire pelucheuse sur le dos, était en caleçon dessous, portait des bottes avec des éperons, et des faux-ongles en acier (semblables aux griffes de Wolverine) au bout des doigts. Voici un lien, décrivant surement mieux le masque que moi, bien que celui que le garçon portait était plus horizontal: ici!

     

    Il y avait aussi un mec portant un manteau en peluche sur le dos, avec des chaussons à tête de Bambi, et portant un serre-tête avec des bois de cerf sur le crane. On l'a revu plus tard en atelier, ce truc pèse trois tonnes, il est en métal pur et dur, je ne sais pas comment il a fait. 

     

    Je vous ai touché deux mots, un peu plus haut à propos d'un atelier imprimerie. Je pense que cela est suffisamment intéressant pour que je vous en parle d'avantage.
    Les deux ou trois filles qui étaient présentes nous ont expliqué en quoi ça consistait. Sur d'imposantes machines manuelles, en fer forgé noir, elles déposent un bloc de pierre rectangulaire sur ces machines, en la badigonent d'encre. Mais aupparavant, elles l'ont enduite d'eau, car il faut que la pierre reste humide. Ensuite elles déposent la feuille à imprimer dessus, et passent la pierre dans un pressoir, grace à une manivelle. Je ne saurais pas expliquer plus, ça avait l'air très compliqué. Et les pierres devaient peser lourd. Apparemment, il s'agissait de pierres calcaires, et l'une des filles nous a dit que les pierres coutaient plus cher que les machines.

    Il flottait dans la pièce une lourde odeur lourde de poivre, qui m'a donné très mal à la tête au bout d'un moment.

     

     

    Je crois que j'ai à peu près fait le tour de la chose. En tout cas, ce qu'il m'a manqué ce jour là, c'est un appareil photo. Je savais que j'aurais du en demander un à Noël! Tant pis, ce sera pour mon anniversaire. Au pire, j'y retournerai l'année prochaine... 

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  • Commentaires

    1
    Mardi 20 Mars 2012 à 23:36

    Génial !

    Mais quand je dis génial, c'est vraiment génial !

    *toutplaqueretfairedesétudesd'art?*

    2
    Grabouilleuse Profil de Grabouilleuse
    Mercredi 21 Mars 2012 à 13:17

    Oh oh Kvardek, te serais-tu découvert une nouvelle passion ?

    3
    Mercredi 21 Mars 2012 à 16:23

    Découvrir, peut-être pas, mais ça confirme que les écoles d'arts sont... *bave* très intéressantes.

    4
    Jeudi 29 Mars 2012 à 08:15

    Coincidence : j'ai habité à Rennes et ...

    moi je suis issue des ARTS APPLIQUES et les VRAIS métiers d'ART sont là avec des objectifs passionants et je déplore le manque d'information à ce sujet ... à ne pas confondre avec les ARTS PLASTIQUES s.v.p.

    http://designetartsappliques.fr/

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